Tout sur le JEI
Vous avez créé votre entreprise il y a moins de 8 ans et réalisez des activités de R&D ? A priori, vous pouvez bénéficier du statut de Jeune Entreprise Innovante qui est une des aides fiscales à l’innovation.
Le statut JEI est lancé en 2004 pour favoriser la création et le développement de PME effectuant des travaux de recherche. Depuis environ 3 000 entreprises bénéficient chaque année du dispositif via des réductions de charges sociales et des exonérations fiscales. Cela représente pour l’État un budget de l’ordre de 100 millions d’euros.
Les exonérations sociales et fiscales de ce statut sont plafonnées à 200 k€ cumulées sur trois exercices fiscaux. On vous explique !
* La proportion de 15% de dépenses de R&D s’apprécie par rapport au total des dépenses de l’entreprise et doit être calculé au regard de critères spécifiques, similaires à ceux du CIR. Ainsi, dans la pratique, les entreprises bénéficiant du statut de JEI déclarent également du CIR.
Concrètement le statut Jeune Entreprise Innovante (JEI), est-ce que c’est pour moi ?
Combien puis-je récupérer (en réduction de cotisations patronales) ?
Pour rappel, les exonérations s’appliquent seulement aux salaires des personnes qui passent au moins 50% de leur temps sur les travaux de R&D.
Obtenir le statut JEI
Encourager la R&D des TPE/PME, c’est le but du statut Jeune Entreprise Innovante (JEI), mis en place en 2004. Et chaque année, plus de 3000 entreprises bénéficient de ce dispositif très généreux qui permet d’obtenir des réductions de cotisations patronales (elles sont environ divisées par 2) et des exonérations d’impôt sur les sociétés (100% d’exonération sur le premier exercice bénéficiaire et 50% sur le deuxième). Ce succès a d’abord poussé le Sénat, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023, à adopter une prolongation du statut JEI jusqu’en 2025 (alors qu’initialement ce dispositif devait s’arrêter au 31 décembre 2022).
Puis lors de la loi de finances pour 2024, ce dispositif a été complété par l’apparition du statut JEIC (Jeune Entreprise Innovante de Croissance) afin d’élargir le nombre d’entreprises bénéficiaires. Ces 2 aides ont beaucoup de points communs et nous préciserons en fin d’article les petites différences qui existent avec un focus sur le JEIC mais pour le moment continuons d’évoquer le statut JEI.
Concrètement, le statut Jeune Entreprise Innovante (JEI) est un dispositif destiné à favoriser l’activité de R&D des PME françaises de moins de 8 ans en leur octroyant des avantages sociaux et fiscaux.
Cette définition du statut JEI nous permet d’aborder un premier malentendu car bien souvent les dirigeants se méprennent sur ce qu’ils vont pouvoir obtenir en étant JEI. Autant être clair, non le statut JEI ne nous permet pas de récupérer de l’argent, ce n’est pas une subvention ! Et non le statut JEI ne vous permet pas d’obtenir du crédit d’impôt, ce n’est pas le CIR. Et pourtant le statut Jeune Entreprise Innovante est l’un des dispositifs les plus GÉNÉREUX du paysage économique français. Mais alors que rapporte-t-il ?
1- Les avantages fiscaux et sociaux
Le statut Jeune Entreprise Innovante présente 2 avantages :
L’avantage social : la réduction des charges patronales
– Chaque mois, vous bénéficiez de réduction sur les cotisations patronales des personnes passant la majorité de leur temps sur les opérations de R&D et d’innovation. À noter qu’une fois le statut JEI obtenu, vous pouvez faire une réclamation auprès de l’URSSAF afin de récupérer ces réductions sur les mois précédant la validation du rescrit si les travaux de R&D avaient déjà commencé.
Par exemple, vous entamez en janvier 2023 un programme de R&D avec 2 ingénieurs rémunérés 35 000€ brut annuel. En février, vous déposez un rescrit JEI présentant vos opérations de R&D et les dépenses prévisionnelles sur l’année 2023. En mai, vous obtenez un avis favorable de l’administration : à partir de là, vous bénéficiez donc d’une réduction de l’ordre de 1500€ par mois sur le montant des charges URSSAF des 2 ingénieurs (soit 600€ par personne). Une réduction qui pourra s’appliquer jusqu’au 8 ans de l’entreprise tant que les 5 critères du JEI sont bien respectés.
A la réception de l’avis de l’administration, vous pouvez adresser une réclamation auprès de l’URSSAF pour obtenir le remboursement du surplus de cotisations patronales versées sur les mois qui ont précédés l’obtention du statut (en l’occurrence dans notre exemple, cela concerne la période de janvier à avril 2023, soit 6000 euros de réduction URSSAF à récupérer). À noter que vous pouvez remonter jusqu’à 3 ans en arrière pour réclamer ce surplus à condition que vous cochiez bien tous les critères d’éligibilité au JEI sur la période concernée.
L’avantage fiscal : l’exonération de l’impôt sur les sociétés
– Vous bénéficiez d’une exonération totale de l’impôt sur les sociétés (IS) sur le premier exercice bénéficiaire qui se présente suite à l’obtention du statut JEI. Et ce premier exercice bénéficiaire peut intervenir à n’importe quel moment au cours des 8 premières années de votre entreprise. Cela peut donc concerner la première année comme la cinquième par exemple si jusque là vous aviez été déficitaire.
– Vous bénéficiez d’une exonération de 50% de l’impôt sur les sociétés (IS) sur le deuxième exercice bénéficiaire qui se présente suite à l’obtention du statut JEI. Là aussi ce deuxième exercice bénéficiaire peut avoir lieu à n’importe quel moment au cours des 8 premières années de votre entreprise.
Attention, le projet de loi de finances pour 2024 a apporté une modification importance sur ce point. Les entreprises créées à partir du 1er janvier 2024 ne peuvent plus bénéficier des exonérations d’IS lorsqu’elles deviennent JEI. Elles profitent uniquement des réductions de charges Urssaf.
Les entreprises créées en 2023 ont jusqu’à leur 8 ans pour appliquer les exonérations d’IS après cet avantage disparaît. Et enfin celles créées avant 2023 ont jusqu’à leur 11 ans. Voici un tableau récapitulatif :
Date de création de l’entreprise | Exonération de l’IS | Réduction des charges URSSAF |
---|---|---|
Avant 2023 | Sur les 2 premiers exercices bénéficiaires réalisés avant les 11 ans de l’entreprise | Jusqu’aux 8 ans de l’entreprise |
En 2023 | Sur les 2 premiers exercices bénéficiaires réalisés avant les 8 ans de l’entreprise | Jusqu’aux 8 ans de l’entreprise |
A partir de 2024 | Aucune | Jusqu’aux 8 ans de l’entreprise |
2- Innovation ou R&D : l’éternelle confusion
Le statut JEI porte très mal son nom ! Car il évoque une (jeune) entreprise qui fait de l’innovation. Or faire de l’innovation n’est pas suffisant pour être JEI, il faut mener des travaux de recherche et développement (R&D). Et là vous vous demandez quelle est la différence entre innovation et R&D ?
L’innovation
Pour faire simple, l’innovation représente le fait de concevoir un produit (ou un logiciel) qui apporte un élément de nouveauté par rapport à la concurrence. Ce caractère de nouveauté peut être sur le plan technique, des fonctionnalités, de l’ergonomie, de l’éco-conception. Peu importe sur laquelle de ces 4 dimensions, vous vous différenciez pourvu que votre nouveauté soit mesurable et significative. Finalement cette notion d’innovation est très accessible. Beaucoup d’entreprises peuvent se reconnaître car dans une économie de marché, c’est important de se différencier de la concurrence ! Mais comme nous vous disions, faire de l’innovation n’est pas suffisant pour être JEI, il faut faire de la R&D.
La R&D
La R&D est une notion plus complexe. La R&D ne se juge pas en fonction de la concurrence ou des solutions du marché. Elle s’apprécie d’un point de vue scientifique, technique. La R&D se caractérise par la présence dans votre activité d’une problématique technique. Une problématique qui ne peut être résolue par les connaissances ou les solutions du moment dans votre domaine. Soit car il y a une absence de solutions soit car elles ne sont pas transposables à votre problématique. Vous faîtes donc face à un blocage, à un verrou technique ou à une incertitude scientifique. Et pour lever ce verrou et faire avancer votre projet, vous êtes contraint de mener vous-même des travaux de R&D. Ce sont des travaux complexes c’est pourquoi l’administration attend qu’ils soient menés par une équipe composée d’au moins un ingénieur (ou niveau technique équivalent) ou un docteur.
3- Les conditions d’éligibilité
Pour être JEI (Jeune Entreprise Innovante), l’entreprise doit remplir 5 critères pour se prémunir d’un risque de redressement en cas de contrôle :
1- Être une PME :
Au sens communautaire, une PME désigne une entreprise de moins de 250 salariés et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas les 50 millions d’euros. Par conséquent une TPE peut demander le statut Jeune Entreprise Innovante !
2- Avoir moins de 8 ans :
Les avantages du JEI sont valables jusqu’au dernier jour de la 7e année civile suivant celle de la création de l’entreprise. En conséquence l’entreprise aura forcément moins de 8 ans à la clôture de l’exercice en question. Ex : je créé mon entreprise en avril 2017, je peux bénéficier du statut JEI jusqu’au 31 décembre 2024.
3- Être indépendante :
On entend par là que plus de 50% du capital doit être détenu par des personnes physiques (sauf cas particulier, exemple : la société est détenue par une holding, elle-même détenue à plus de 50% par une personne physique).
4- Être nouvelle :
L’entreprise ne doit pas faire l’objet d’une reprise ou d’une extension d’activité. Une filiale (ou une spin-off) peut toutefois obtenir le statut JEI si son activité est différente de celle de la société mère. Dans ce cas de figure, chaque société doit également avoir son personnel dédié.
5- Avoir un volume de dépenses de R&D supérieur à 15% des charges totales de l’entreprise :
Les dépenses de R&D prises en compte sont les salaires du personnel de R&D, les dépenses de R&D externalisées (auprès d’un organisme public ou d’un organisme privé agréé), les frais de propriété industrielle et les dotations aux amortissements en rapport avec l’activité de R&D.
Vous l’aurez compris, pour être JEI, il est indispensable de mener des travaux de R&D. Pour faire simple, l’administration entend par R&D, les travaux qui lèvent des incertitudes techniques, dépassent l’état des connaissances du moment, présentent un caractère nouveau.
Vous cochez toutes les cases ? Alors c’est le moment de devenir JEI !
4- La démarche pour être JEI
Pour obtenir le statut, il y a 2 possibilités. Une voie risquée et une voie sécurisée…
La voie risquée : l’auto-déclaration
Eh oui vous pouvez vous auto-déclarer JEI. Comment faire ? Rien de plus simple, vous appelez votre expert-comptable, vous lui annoncez qu’à présent vous êtes Jeune Entreprise Innovante et vous lui demandez d’appliquer les réductions de cotisations patronales sur les salaires du personnel de R&D (c’est-à-dire ceux qui passent au moins 50% de leur temps en R&D). Si cette stratégie peut sembler attirante, elle n’en n’est pas moins dangereuse. Car dans le cadre du statut JEI, les contrôles peuvent venir de l’URSSAF et/ou du ministère de la Recherche. Et ces entités vous réclameront des pièces justificatives pour comprendre en quoi vous êtes éligible au statut JEI.
Vous devrez notamment fournir un dossier technique robuste pour présenter vos travaux de R&D. Si l’administration n’est pas convaincue, vous vous exposez à un redressement de l’ensemble des sommes indûment perçues mais également à un redressement de votre éventuel crédit impôt recherche car le CIR et le statut JEI vont souvent de pair. La grande majorité des redressements, dans le cadre du statut JEI, s’explique par un défaut d’éligibilité de l’entreprise. Beaucoup de dirigeants pensent faire de la R&D mais leur notion de R&D ne correspond pas toujours avec celle de l’administration. D’où l’intérêt de passer par le rescrit…
La voie sécurisée : le rescrit JEI
Le principe de cette démarche est de solliciter en amont l’avis de l’administration sur votre éligibilité au statut JEI. Au lieu de profiter immédiatement des avantages du JEI au risque d’être contrôlé et redressé, vous inversez la situation. Avant d’appliquer les réductions de cotisations patronales, vous montez un dossier présentant votre entreprise et vos travaux de R&D (sous la forme d’un dossier technique). À réception du dossier, l’administration a 3 mois pour prendre une décision. Sans réponse dans les 3 mois, cela vaut accord tacite et vous pouvez donc vous considérer comme JEI.
Une fois votre rescrit JEI validé (par une réponse positive ou un accord tacite), vous pouvez profiter en toute sécurité des avantages du dispositif. Cela facilitera également la déclaration de votre crédit impôt recherche car si votre rescrit JEI est validé cela veut dire que l’administration considère que vous faîtes bien de la R&D. Elle ne va donc pas se déjuger quelques mois plus tard au moment d’étudier votre déclaration de CIR (sauf si les travaux décrits dans le rescrit ne correspondent pas aux travaux pour lesquels vous demandez du crédit d’impôt).
Le dossier de rescrit JEI comporte 3 éléments :
- Le formulaire administratif est destiné à vérifier que les 4 premiers critères d’éligibilité sont remplis.
- L’état prévisionnel des dépenses de recherche et développement (ou prévisionnel financier) permet de vérifier que le volume de dépenses de R&D est > 15% des dépenses totales de l’exercice.
- Le dossier technique du projet présente principalement les opérations de R&D, l’état de l’art, les verrous technologiques, les travaux réalisés ou prévus, le personnel travaillant sur le projet…
Le dossier est à déposer auprès du Service des Impôts des Entreprises (SIE) duquel l’entreprise dépend. Après dépôt, l’administration a alors un délai de 3 mois pour fournir une réponse. Une absence de réponse dans ce délai vaut accord tacite.
Le rescrit peut être déposé à tout moment dans les 8 premières années de la société. Dans la pratique, nous recommandons aux jeunes entreprises de déposer ce rescrit dès qu’elles ont suffisamment de visibilité sur les travaux à réaliser et dès qu’elles s’apprêtent à verser des salaires. Elles pourront ainsi bénéficier des exonérations de cotisations patronales sur les premiers salaires versés.
5- Le statut JEIC
Comme nous l’avons dit précédemment, la loi de finances de 2024 est venue compléter le statut JEI avec la naissance de son petit frère : le statut Jeune Entreprise Innovante de Croissance, JEIC.
Le statut JEIC permet comme le statut JEI d’obtenir des réductions de charges Urssaf sur le personnel de R&D. En revanche une JEIC ne peut pas profiter de l’exonération d’IS.
En ce qui concerne les critères d’éligibilité, ce sont les mêmes que ceux du statut JEI à une exception et elle est de taille !
Les dépenses de R&D n’ont plus besoin de dépasser les 15% de dépenses totales de l’entreprise. Elles peuvent se situer entre 5 et 15%. Cela devrait permettre de concerner un public plus large. En revanche, un critère supplémentaire est ajoutée : c’est cette fameuse notion de croissance que l’on retrouve dans le nom du dispositif et qui reste encore à préciser par l’administration.
La démarche pour obtenir le statut JEIC est là encore identique à celle du statut JEI.
Enfin, on entend parfois parler du statut JEIR (Jeune Entreprise Innovante de Rupture). Ce dispositif évoqué et présenté aux parlementaires n’a finalement pas été retenu.
Intéressé par le statut de JEI ou JEIC ? Si vous avez des questions sur votre éligibilité ou les démarches à réaliser, nos experts sont à votre écoute. Vous pouvez prendre directement RDV gratuitement en ligne.