Les aides fiscales à l’innovation pèsent lourd dans le budget de l’État. Avec près de 7 milliards d’euros par an, le Crédit Impôt Recherche est même la première niche fiscale de France. Si ces dispositifs, comme le CIR mais aussi le CII, sont indispensables pour soutenir l’innovation, favoriser l’emploi et maintenir la compétitivité du pays, il reste indispensable d’exercer une surveillance car cela reste de l’argent public.
Mais cette « surveillance » fait souvent peur et entraîne beaucoup de fantasmes et de confusions. On entend parler tantôt de demande d’information de l’administration, tantôt de contrôle fiscal ou encore de vérification de comptabilité. Autant de termes mal compris qui n’ont pourtant pas les mêmes significations, ni les mêmes objectifs et implications. En revanche, ils ont en commun le fait de susciter l’inquiétude au point que certaines entreprises préfèrent ne pas bénéficier de ces dispositifs, ce qui est regrettable.
C’est pourquoi une clarification s’impose ! Pour faire simple, lorsque l’administration se rapproche d’une entreprise pour « enquêter » sur le CIR ou le CII, on peut habituellement parler de contrôle fiscal. Et ce contrôle prend principalement deux formes : la demande d’information ou la vérification de comptabilité.
Dans cet article, nous allons lever le voile sur ces deux démarches pour les démystifier et vous fournir des conseils pratiques pour y faire face. Comprendre ces processus est essentiel pour répondre efficacement à l’administration et sécuriser votre crédit d’impôt.
Au sommaire de cet article :
Article mis à jour le 21/11/2024
1. Les deux façons de bénéficier du CIR/CII
C’est le point de départ ! Pour bien faire la distinction entre les différentes formes de contrôle fiscal, il faut revenir à l’origine à savoir : la déclaration du crédit d’impôt.
Et là il y a deux situations possibles :
- Les entreprises qui sont bénéficiaires. Elles vont calculer et déclarer leur crédit d’impôt. Ensuite, elles vont déduire leur montant de CIR ou de CII de leur impôt sur les sociétés (IS). Exemple : l’entreprise Dupont a 60 000 € d’impôt sur les sociétés à payer mais par ailleurs, elle a 50 000 € de CIR. Elle se retrouve avec seulement 10 000 € d’IS à payer. C’est ce que l’on appelle l’imputation de la créance.
- Les entreprises déficitaires. Elles vont calculer et déclarer leur crédit d’impôt également. En revanche, comme elles n’ont pas d’IS à payer, ce CIR ou CII va constituer une sorte d’avoir, et sera déduit sur les prochains exercices bénéficiaires, ou bien remboursé automatiquement au bout de 3 ans. Les PME ont alors aussi la possibilité de faire une demande de remboursement immédiat à l’administration pour ne pas attendre les 3 ans, dans l’espoir d’obtenir au plus tôt un virement de l’administration correspondant au montant du crédit d’impôt.
2. La demande d’information : un contrôle a priori
Lorsqu’une entreprise est déficitaire, elle peut donc faire une demande de remboursement immédiat en remplissant le formulaire 2573-SD en plus du cerfa de déclaration, le fameux formulaire 2069-A-SD. C’est également le cas pour une entreprise qui déclare du CIR/CII de manière rétroactive, via ce que l’on appelle une déclaration rectificative, c’est-à-dire en valorisant les dépenses en R&D et en innovation de l’année N-2 ou N-3 (car oui avec le crédit impôt recherche et le crédit impôt innovation, on peut revenir jusqu’à 3 ans en arrière !).
Avant de procéder au remboursement, bien souvent, l’administration procède à des vérifications afin de comprendre le montant de crédit d’impôt obtenu et surtout de vérifier l’éligibilité de l’entreprise au dispositif concerné. C’est ce que l’on appelle une demande d’information !
Cette demande d’information est une étude des pièces de la part du service des impôts des entreprises (SIE). Il s’agit généralement d’envoyer :
- Les éléments financiers (dossier financier, journal de paie, factures des prestataires, feuille de temps, CV, diplômes…)
- Le dossier technique justificatif qui décrit les travaux réalisés.
Cette demande d’information ne vise que la déclaration de CIR ou de CII pour laquelle vous demandez un remboursement. Le reste de votre comptabilité n’est pas du tout questionné. Le seul but de l’administration est alors de valider ou non le remboursement de votre crédit d’impôt.
Les échanges se font par courrier et l’inspecteur du service des impôts des entreprises peut mandater un expert technique du MESRI (Ministère de l’Enseignement Supérieur de la Recherche et l’Innovation) pour valider l’éligibilité de vos travaux.
Cette demande d’information a priori se solde donc par un accord ou un refus de la demande de remboursement (ou par un remboursement revu à la baisse si certaines dépenses ou certains projets n’ont pas été considérées éligibles).
Si vous souhaitez contester les conclusions de l’inspecteur suite à cette demande d’information, vous pouvez alors répondre pour tenter de faire changer d’avis l’administration en envoyant à l’inspecteur une réclamation.
Si après cela, le vérificateur n’a pas changé d’avis, vous pouvez :
- Envoyer une nouvelle réclamation à l’inspecteur.
- Faire appel au conciliateur de la DGFIP (Direction générale des Finances publiques).
- Saisir le tribunal administratif.
3. L’avis de vérification de comptabilité : un contrôle a posteriori
Lorsque vous avez directement imputé votre crédit d’impôt sur votre montant d’IS ou bien lorsque vous avez obtenu un remboursement par le passé, l’administration peut toujours procéder à des vérifications. Dans le cadre du crédit impôt recherche et du crédit impôt innovation, ces vérifications peuvent même être effectuées dans les trois ans qui suivent la déclaration. L’administration fiscales vous adresse alors un avis de vérification de comptabilité.
Contrairement à la demande d’information qui a pour but de vérifier si vous êtes bien en droit d’obtenir un remboursement, la vérification de comptabilité va vérifier si vous étiez bien en droit de bénéficier du crédit d’impôt dont vous avez déjà profité (dans le cadre d’une imputation ou d’un remboursement effectué). En résumé, la demande d’information se situe avant de toucher le crédit d’impôt alors que la vérification de comptabilité se situe après.
Et à la différence de la demande d’information qui ne porte que sur le CIR et le CII, la vérification de comptabilité porte en général sur l’ensemble de la comptabilité de l’entreprise (même si parfois le champ d’investigation est limité au crédit d’impôt perçu). Autre différence : En général, la vérification de comptabilité peut s’effectuer sur la base d’un contrôle sur pièces, mais aussi parfois d’un contrôle sur place , c’est-à-dire que l’inspecteur se déplace dans votre entreprise.
Concernant le CIR et le CII, le vérificateur demandera souvent les pièces similaires à ce qu’on retrouve dans la demande d’information à savoir les éléments financiers et le dossier technique justificatif.
Suite à ces vérifications, l’administration peut valider les montants de CIR ou CII. Mais si elle juge qu’il y a eu des erreurs, elle adressera une proposition de rectification. Ce document correspond aux conclusion suite au contrôle fiscal, on y retrouve notamment les dépenses non retenues dans le calcul, le montant du redressement et les motifs de ce redressement.
Suite à la proposition de rectification, une procédure spécifique vous permet de contester les conclusions de l’administration via ce que l’on appelle les observations du contribuable (à envoyer dans un délai de 30 jours renouvelable une fois). Le vérificateur se doit de vous répondre, c’est ce que l’on appelle la réponse aux observations du contribuable. Si vous n’êtes toujours pas satisfait à ce stade, vous pouvez demander « un recours hiérarchique ». C’est un moyen de changer d’interlocuteur et d’échanger avec le N+1 voir le N+2 de votre vérificateur.
Si la situation n’évolue pas, vous pouvez alors saisir le médiateur des Finances Publiques, le médiateur des entreprises voire ensuite le conciliateur fiscal.
Et si après tout ça, vous êtes toujours en désaccord, il vous faut adresser une réclamation à votre service des impôts. Si votre réclamation est rejetée, vous n’avez plus qu’à saisir le tribunal administratif.
Comme vous pouvez le voir, en ce qui concerne le CIR et le CII, il existe beaucoup d’étapes vous permettant de défendre votre cause !
4. Contrôle fiscal et idées reçues
Parfois lorsque nous échangeons avec des entreprises, les dirigeants ont tellement peur d’un contrôle fiscal sur l’ensemble de leur comptabilité qu’ils préfèrent ne pas déclarer du crédit impôt recherche ou du crédit impôt innovation alors qu’ils sont éligibles. Pourquoi ? Car ils pensent que la déclaration de CIR ou de CII favorisera une vérification de comptabilité. C’est une grave erreur ! L’avis de vérification de comptabilité survient de manière décorélée avec la déclaration de CIR ou de CII. En moyenne, une entreprise en reçoit un tous les sept ans.
En revanche, la demande d’information survient très régulièrement lors d’une demande de remboursement de CIR ou de CII. Mais pas de panique ! C’est plutôt une bonne chose de voir que l’administration vérifie comment est distribué l’argent public et encore une fois ça reste une procédure exclusivement centrée sur le CIR et le CII qui a seulement pour but de valider ou non un remboursement, c’est donc bien différent d’une vérification de comptabilité.
Quelle que soit la nature de votre contrôle fiscal, il est primordial de bien préparer les pièces dans le cadre de sa déclaration et notamment le dossier financier et le dossier technique justificatif. Le mieux est d’ailleurs de ne pas attendre un courrier de l’administration pour construire des éléments robustes.
Si vous avez besoin d’aide pour construire ces pièces ou pour convaincre l’administration dans le cadre d’un contrôle fiscal, nous sommes à votre écoute. Il vous suffit de prendre RDV avec nos experts !
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