Avec la Loi de Finances 2025, le fossé entre le Crédit d’Impôt Innovation (CII) et le Crédit d’Impôt Recherche (CIR) s’est creusé. En effet, depuis le 1er janvier 2025, le CII permet aux entreprises de récupérer 20% de leurs dépenses en innovation éligibles (contre 30%  auparavant). Tandis qu’avec le CIR, les entreprises récupèrent toujours 30% de leurs dépenses en R&D éligibles avec en plus la prise en compte de frais de fonctionnement qui viennent grossir l’assiette de calcul.

Ainsi par exemple, pour un collaborateur rémunéré 40 000 € brut annuel et qui passe tout son temps en innovation, une entreprise récupère 11 000 € de CII. Avec les mêmes conditions de rémunération, si le collaborateur passe tout son temps en R&D, cela représente un montant de CIR de 23 500 €.

Pour une personne, cela donne déjà un écart important. Alors imaginez lorsqu’il y a plusieurs profils techniques dans l’équipe ! De plus, le montant de Crédit d’Impôt Innovation est plafonné à 80 000 € par an alors que le montant de crédit impôt recherche n’est lui pas plafonné.

Pour ces raisons, de plus en plus d’entreprises se demandent si elles ne pourraient pas basculer vers le CIR, plus généreux mais moins accessible. Autrement dit, elles cherchent à savoir dans quelle mesure leurs travaux d’innovation pourraient être requalifiés en travaux de R&D, une notion plus exigeante.

Bonne nouvelle, la frontière entre innovation et R&D est plus fine qu’il n’y paraît, et il suffit parfois d’une meilleure structuration de vos projets, d’une démarche mieux construite et d’une prise de hauteur sur vos travaux pour entrer dans le champ du CIR. 

Alors, êtes-vous déjà plus proche de la R&D que vous ne le pensiez ? Quelles sont les axes d’amélioration à suivre pour vous permettre de basculer vers le CIR ? C’est ce que nous allons voir !

Article mis à jour le 20/03/2025

La différence entre innovation et R&D

Avant de vous expliquer comment passer du CII au CIR, il est important de bien comprendre la différence entre innovation et R&D.

Pour obtenir du Crédit d’Impôt Innovation, comme son nom l’indique, il faut mener des travaux d’innovation. Et l’innovation est une notion très accessible. Cela nécessite « simplement » de développer un produit (matériel ou immatériel comme un logiciel) à destination du marché qui par rapport à la concurrence apporte un élément de nouveauté en termes techniques, de fonctionnalités, d’ergonomie ou d’éco-conception par rapport à la concurrence. Autrement dit, l’innovation ne nécessite pas de difficultés techniques particulières. Pas besoin non plus d’avoir des ingénieurs dans l’équipe.

Ainsi, le Crédit d’Impôt Innovation (CII) concerne donc des opérations de conception de prototypes ou installations pilotes de nouveaux produits aux performances supérieures par rapport à un marché de référence. L’objectif est d’améliorer les performances d’un produit sous l’angle du client final, avec volonté de mise sur le marché du produit.

De son côté, le Crédit d’Impôt Recherche (CIR) permet aux entreprises de financer leurs travaux de Recherche et Développement (R&D), mais encore faut-il que ces derniers répondent aux critères définis par le Manuel de Frascati

Pour être éligibles, les projets doivent générer des connaissances nouvelles, s’appuyer sur une approche originale et créative, impliquer une incertitude scientifique ou technique, être menés de façon structurée et aboutir à des résultats transférables ou reproductibles

En clair, il ne s’agit pas simplement d’améliorer un produit existant, mais bien de repousser les limites des connaissances actuelles en répondant à une problématique scientifique et technique non résolue et en surmontant des verrous technologiques identifiés grâce à une étude approfondie de l’état de l’art. 

Il y a 3 natures d’opérations de recherche concernées : 

  • la recherche fondamentale, qui vise la compréhension pure sans application immédiate;
  • la recherche appliquée, qui transforme ces connaissances en solutions concrètes;
  • le développement expérimental, qui constitue l’essentiel des déclarations CIR et qui consiste en des travaux systématiques fondés sur les nouvelles connaissances tirées de la recherche et de l’expérience pratique visant à déboucher sur de nouveaux produits ou procédés ou à améliorer les produits ou procédés existants.  C’est souvent dans ce cas de figure que la frontière entre innovation et R&D est fine et qu’il y a le plus de potentiel pour une PME innovante de valoriser une partie de son activité en R&D.

Ainsi, les projets éligibles au CIR doivent permettre de réaliser un progrès scientifiques ou technique, grâce à l’exploration d’un approche originale et  qui permettra la dissipation d’une incertitude technique et/ou scientifique par rapport à un état de l’art ( connaissances issues principalement des publications scientifiques, des brevets, ou de l’open source…). Cela peut donc concerner des projets de développement de produits innovants, mais pour lesquels la  levée d’un verrou technologique ou scientifique est indispensable, et fera finalement  progresser l’état de l’art, sous l’angle de la connaissance.

Pour être recevables, ces travaux doivent être encadrés par des profils qualifiés (ingénieurs ou docteurs) et suivre une démarche expérimentale rigoureuse (hypothèses, expérimentation, interprétation des résultats). 

Vous pensez être à la frontière entre innovation et R&D ? Voici quelques conseils pour bien structurer ses activités de R&D, renforcer la pertinence et l’efficacité de ses développements.

Conseil 1 : misez sur des profils spécialisés en R&D

La réussite d’un projet de R&D dépend largement des compétences des équipes engagées

Pour maximiser vos chances de succès et garantir l’éligibilité au CIR, il est crucial d’intégrer des profils scientifiques et techniques, tels que des ingénieurs spécialisés dans le domaine de recherche concerné (un ingénieur spécialiste des matériaux pour des enjeux de développement d’un nouveau polymère, ou un ingénieur en environnement pour le développement de modèle agro-écologiques…) ou encore, des docteurs, dont l’expertise est directement adaptée aux défis scientifiques et techniques que vous rencontrez. 

Lors de vos recrutements, privilégiez ces compétences pointues afin de renforcer la pertinence et la qualité de vos travaux de recherche. Ces profils permettront de structurer vos projets et d’assurer leur progression dans un cadre rigoureux et efficace.

Conseil 2 : identifiez vos problématiques de R&D

Il est possible que votre entreprise mène déjà des activités de R&D sans en avoir pleinement conscience. Prenez le temps d’analyser vos produits innovants sous l’angle technologique pour détecter des ruptures ou des avancées à réaliser.

Prenez du recul et essayez par exemple de reformuler vos objectifs commerciaux en objectifs scientifiques et techniques

Voici quelques exemples généraux :

  • “Je souhaite générer des gains de productivité ?” = “Je dois réussir à développer une technologie plus performante”
  • “Je souhaite réduire l’impact environnemental de mon produit ?” = “Je dois réussir à développer d’un nouveau type de matériau biosourcé et recyclable”
  • “Je souhaite améliorer la sécurité des données ?” = “Je dois développer de nouvelles approches informatiques”

Évaluez si vous avez surmonté des défis scientifiques ou techniques. Une fois de plus, voici les principales questions à se poser :

  • en quoi ce projet se différencie d’un projet habituel du domaine ?
  • que vise scientifiquement ou technologiquement ce projet ?
  • est-il possible d’identifier facilement la solution qui permettra d’atteindre l’objectif ?
  • qu’apportez-vous aux connaissances actuelles ?
  • qu’apportez-vous par rapport à la pratique courante ?

Ainsi, en vous posant les bonnes questions, vous pourrez ainsi identifier pour chacune des étapes, s’il s’agit d’un travail de conception “classique” (travaux d’ingénierie complexe compliqués répondant davantage au CII) ou si vous avez besoin d’engager une démarche de R&D (verrous technologiques ou scientifiques répondant davantage au CIR).

En plaçant chacune de ces briques dans le temps, vous pourrez construire votre RoadMap de R&D, identifier vos priorités et définir les moyens à mettre en œuvre. 

Cette introspection peut vous permettre de bien placer votre activité au sein de la stratégie de développement de votre entreprise, et, cerise sur le gâteau, de repérer des opportunités insoupçonnées d’éligibilité au CIR et de valoriser des travaux de recherche déjà réalisés..

Conseil 3 : structure votre démarche de développement

Une fois vos verrous identifiés, passer d’une approche empirique à une véritable démarche expérimentale est un pas crucial pour réussir dans la R&D. 

Il ne s’agit pas simplement de tâtonner, mais de suivre un processus planifié et structuré : Observation, Problématique, Hypothèse, Essai, Résultats, Interprétations, et Conclusions (la méthode OPHERIC). En adoptant cette approche, chaque étape devient une occasion d’approfondir vos connaissances, qu’elles mènent à un succès ou à un échec. Même un résultat négatif à sa valeur, car il ouvre la voie à de nouvelles pistes. 

Documentez systématiquement votre travail, par exemple, en tenant un cahier de laboratoire. Cela ajoute de la rigueur à votre démarche et renforce la crédibilité de vos résultats. Cette structuration vous aide à progresser de manière plus sûre et plus efficace dans vos projets de R&D.

Il arrive ainsi que sur le fond, les projets réalisés par les entreprises répondent bien à une problématique de R&D (il y a bien un verrou à lever), mais la façon dont les travaux sont réalisés ou documentés n’est pas assez rigoureuse pour répondre à la définition d’une démarche expérimentale de Recherche. Structurer votre démarche de développement vous permettra d’aller plus loin !

La démarche expérimentale

La démarche expérimentale doit être clairement exposée.

Conseil bonus : intégrez des innovations de rupture

Pensez à la place de vos activités d’innovation ou de R&D dans la stratégie de développement de l’entreprise et de l’impact de vos efforts de R&D. 

Parfois, en visant plus loin, on prend de l’avance sur le marché, ou on élargit ses connaissances pour être plus réactif. Mettre en place un vrai programme de R&D peut prendre du temps au départ, mais les retombées peuvent être décuplées. 

Pensez par exemple aux innovations de rupture : ces dernières se caractérisent par une créativité marquée, une nouveauté réelle et une incertitude technique ou scientifique. 

Contrairement aux simples améliorations incrémentales (qui suffisent avec la notion d’innovation), elles proposent une avancée significative par rapport aux solutions existantes, transformant profondément le domaine d’application. En misant sur ces innovations disruptives, vous démontrez non seulement votre capacité à repousser les frontières de la connaissance, mais vous augmentez également l’impact de vos travaux de recherche.

Dans le cas des projets digitaux, on parle d’entreprises deeptech qui visent à produire de grandes avancées et progrès technologiques dans des domaines particuliers : intelligence artificielle appliquée à l’imagerie médicale, développement d’avions électriques alimentés par propulsion à hydrogène, robots exosquelettes etc…

Conclusion

En définitive, passer du CII au CIR n’est peut-être pas aussi complexe qu’il n’y paraît. Parfois, il suffit d’un ajustement dans la manière dont vous abordez vos projets d’innovation pour franchir la frontière entre le développement de nouveaux produits et le développement expérimental. 

En structurant vos démarches, en intégrant des innovations de rupture et en vous entourant des bons profils, vous pourriez renforcer votre démarche de recherche et, en plus de prétendre au CIR, gagner en efficacité de développement. Et le saut à réaliser n’est peut-être pas si grand. 

Il est donc essentiel d’examiner de près vos projets et de ne pas hésiter à faire évoluer votre approche. Chez SELF & INNOV, nous mettons notre expertise à votre service pour vous accompagner dans l’identification et la valorisation de vos activités de R&D. N’hésitez pas à prendre contact avec nos experts pour faire évaluer (et évoluer) vos projets.

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