Valoriser la propriété intellectuelle des entreprises françaises et favoriser leurs efforts de R&D : voilà les 2 grands enjeux qui expliquent la mise en place de l’IP Box.
L’IP BOX, (ou Patent Box) est un dispositif qui a pour but de soutenir les entreprises dans leurs efforts de R&D via la mise en place d’un régime fiscal avantageux.
Mais avant de détailler cette aide fiscale à l’innovation, d’expliquer son fonctionnement, le public concerné et les démarches à effectuer, quelques éléments de contexte s’imposent.
Au début des années 2000, de nombreux pays de l’OCDE ont mis en place des systèmes fiscaux attrayants sur les profits issus de la propriété intellectuelle (à commencer par les brevets). Ils espéraient ainsi doper les activités de recherche des entreprises nationales et attirer des entreprises innovantes étrangères. En 2000, le système de « patent box » voit le jour en France. Le principe ? Une réduction du taux d’impôt sur les sociétés (IS) qui passe de 33,3% (en 2024 ce taux normal est de 25%) à 15% sur les revenus tirés des brevets. Mais pour répondre aux exigences des instances européennes, la France fait évoluer son dispositif, qui devient « IP Box », en 2019 dans le cadre de la loi de Finances avec 2 modifications majeures :
- Le taux d’imposition sur les revenus tirés de la propriété intellectuelle passe à 10%.
- Ce taux ne concerne plus seulement les revenus provenant des brevets mais plus largement les revenus en lien avec des actifs de propriété intellectuelle comme les licences de logiciels.
Maintenant que vous connaissez le principe, il est temps de savoir si cela vous concerne !
Au sommaire de cet article :
Article mis à jour le 24/10/2024
L’IP Box, est-ce que c’est pour moi ?
Concrètement l’IP Box est un dispositif qui permet à une entreprise d’avoir un taux d’impôt sur les sociétés de 10% sur les résultats générés par la cession, la concession, la sous-concession de :
- brevets, certificats d’utilité et certificats complémentaires de protection rattachés à un brevet ;
- certificats d’obtention végétale (COV) ;
- logiciels protégés par le droit d’auteur ;
- procédés de fabrication industriels, lorsqu’ils résultent d’opérations de recherche.
Par conséquent pour profiter de l’IP Box, vous devez être bénéficiaire. Car ce dispositif permet une réduction d’impôt, et non pas un crédit d’impôt comme avec le CIR ou le CII. Si vous êtes déficitaire, vous n’obtenez donc pas d’avantage financier. Il n’y pas de système de remboursement comme avec le crédit impôt recherche ou le crédit impôt innovation.
Enfin point important, pour bénéficier de l’IP Box, vous devez avoir engagé des dépenses de R&D (au sens du CIR) dans le cadre du développement de votre logiciel ou concernant le dépôt de votre brevet. Ces dépenses R&D ne doivent pas forcément être toujours en cours. Elles peuvent avoir été réalisées à n’importe quel moment depuis l’origine du logiciel ou du brevet. Par conséquent, une entreprise qui n’aurait bénéficié que du crédit impôt innovation (car ayant eu uniquement des dépenses d’innovation) n’est pas éligible à l’IP Box.
Comment calculer le montant de l’impôt sur les sociétés avec l’IP Box ?
Tout d’abord, on rappelle que les revenus éligibles à ce dispositif sont ceux générés par les redevances de contrats de licence, de sous-licence et les plus-values des contrats de cession des actifs incorporels éligibles. Vous devez donc commencer par analyser la nature de vos revenus.
Une des difficultés réside souvent dans le fait que les contrats de licence ont été rédigés et chiffrés comme des packages qui englobent à la fois la licence du logiciel en lui-même (son usage), l’usage de sa marque, des documentations, les formations utilisateurs, la maintenance… Or, toutes les lignes de revenus liés à ces différents éléments ne sont pas nécessairement détaillées. Il est donc important avant de vous lancer dans le calcul de bien isoler les revenus éligibles et d’exclure les autres (usage de la marque, maintenance, formation…).
Maintenant que cette précision est apportée, passons à la partie calcul !
Étape 1 : le calcul du résultat net
Pour déterminer l’assiette imposable à 10%, il faut d’abord calculer le résultat net. Il correspond à la différence entre les revenus acquis au cours de l’exercice, tirés des actifs éligibles, et les dépenses de recherche et de développement qui concernent directement ces actifs au cours du même exercice.
Parmi les dépenses de R&D prises en compte, on retrouve :
- les dépenses de personnel de recherche ;
- les dépenses d’externalisation de la R&D ;
- les coûts des matières premières et fournitures consommées pour les besoins des activités de R&D ;
- les dépenses d’acquisition d’installations techniques, de matériels et outillages industriels affectés directement à la réalisation d’opérations de R&D ;
- les dépenses de création ou d’acquisition d’actifs incorporels bénéficiant du régime IP Box ;
- les redevances de concession d’actifs bénéficiant du régime IP Box dues par l’entreprise sous-concédante ;
- les frais de prise et de maintenance des titres de propriété industrielle.
Exemple, en 2023 l’entreprise Dupont a gagné 100 k€ grâce aux redevances de contrats de licence de son logiciel. Et la conception de ce logiciel au cours de l’année 2023, a demandé à l’entreprise Dupont des travaux de R&D. Des travaux réalisés en interne par un ingénieur informatique (mobilisé à 100% sur le projet et rémunéré 35 k€ brut annuel) et en externe par un prestataire indépendant avec des honoraires qui s’élèvent à 15 k€.
En 2023, le résultat net de l’entreprise Dupont est alors de 50 k€ (100 – 35 – 15).
Lorsque le résultat net déterminé est négatif, il est reporté et imputé sur les résultats nets de concession du même actif réalisés au cours des exercices suivants.
Ainsi, pour que le résultat de ce calcul soit positif, et donc que vous puissiez effectivement bénéficier d’une réduction d’IS, vos revenus issus des concessions de licences doivent être supérieurs aux dépenses de R&D engagées lors de l’exercice concerné. Si pour cet exercice en question, vous n’avez pas eu de dépenses de R&D, ce n’est pas un problème (si bien sûr, vous avez bien eu des dépenses de R&D dans le passé). Dans ce cas, à cette étape du calcul, vous retenez seulement vos revenus.
Étape 2 : le calcul du ratio Nexus
Le ratio Nexus est un taux qui va venir moduler le résultat net imposable. Ce ratio Nexus a été créé pour éviter les optimisations fiscales et va permettre de capturer les dépenses intra-groupes, depuis l’origine.
Pour le calculer, il faut mettre au numérateur les dépenses de R&D, engagées depuis l’origine pour développer l’actif. On parle là des dépenses internes et des dépenses liées aux prestations d’entreprises non liées (sans lien de dépendance). Ces dépenses sont majorées de 30%. Au dénominateur, on retrouve l’ensemble des dépenses en R&D liées au développement de cet actif (dépenses internes, dépenses relatives à des entreprises liées comme des filiales ou des entreprises non liées). Par conséquent, une entreprise qui n’a jamais eu de dépenses de R&D, se retrouve avec un ratio Nexus à 0. C’est pourquoi, elle n’est pas éligible à l’IP Box. Cela exclut donc les logiciels qui ne sont pas issus d’une activité de R&D.
Ainsi pour reprendre l’exemple de l’entreprise Dupont, le ratio Nexus = 50k€ x 1,3 / 50 k€ soit 130%
À noter que le ratio Nexus est à calculer tous les ans pour chaque actif et qu’il ne peut pas être supérieur à 100%. Par conséquent, dans notre exemple, le ratio de l’entreprise Dupont est donc ramené à 100%.
Étape 3 : le calcul de l’assiette imposable à 10%
Cette assiette correspond au résultat net auquel on applique le ratio Nexus.
Assiette imposable à 10% = (Revenus – dépenses en R&D) x Ratio Nexus
Dans le cas de l’entreprise Dupont, cela nous donne (100 – 50) x 1.
Ainsi la totalité du résultat net est imposée à 10%. Donc concernant les revenus tirés de son logiciel, l’entreprise Dupont va payer en impôt :
(50 k€ x 10%) soit un montant d’IS de 5 000 euros au lieu de 12 500 euros (50 k€ x 25%). L’IP Box représente donc une économie de 7 500 euros.
IP Box : quelles sont les démarches à effectuer ?
Ce dispositif ne s’applique pas automatiquement. L’entreprise doit opter pour ce régime de faveur dans sa déclaration de résultat, et cela pour chaque actif. Elle remplit alors le formulaire 2468-SD. Si l’entreprise décide de ne plus profiter de ce régime, alors elle perdra l’option de manière définitive pour l’actif concerné.
L’entreprise qui bénéficie de l’IP Box doit alors constituer un dossier justificatif à tenir à disposition de l’administration fiscale en cas de contrôle. Cette documentation comprend :
- une description des travaux d’innovation et de R&D réalisés pour la conception de l’actif ;
- les détails du calcul du montant d’IS à payer ;
- la liste des actifs incorporels éligibles : brevets, logiciels originaux et potentiellement inventions brevetables non brevetées et une démonstration de cette éligibilité ;
- le lien entre chacun des actifs avec une ligne de revenus et une ligne de dépense en R&D. Le dossier doit permettre de prouver que cette association est sans équivoque.
A noter qu’en cas d’absence de documentation, vous pouvez être redevable d’une amende. Une grande attention doit être portée à la justification de dépenses et de revenus (contrat de licences, factures…).
Comme vous pouvez le constater, il y a des passerelles entre l’IP Box et les aides fiscales à l’innovation (CIR/CII), notamment au niveau des dépenses en R&D éligibles. La mise en place et la justification de l’IP Box nécessitent donc une bonne connaissance technique des projets et des travaux de RDI. Avant de vous lancer dans la déclaration, il est important de s’assurer de votre éligibilité au dispositif.
La vidéo pour tout savoir sur l’IP BOX
Vous connaissez maintenant les avantages de l’IP BOX ! Si vous souhaitez en apprendre encore un peu plus, Yasmine Bouslimani, experte en fiscalité de l’innovation chez SELF & INNOV, vous en parle dans cette vidéo :
Si vous avez besoin d’aide pour vérifier votre éligibilité, pour calculer le montant du bénéfice imposable à taux réduit ou pour monter votre dossier justificatif, nous sommes à votre écoute. Il vous suffit de prendre un RDV avec notre équipe d’experts !