Tout sur le CII
Le crédit impôt innovation (CII) est sans doute le moins connu des dispositifs fiscaux dédiés à l’innovation. Mis en place en 2013, le CII profite seulement à 8 000 entreprises par an alors qu’il s’applique pourtant à une grande variété d’activités. Contrairement au CIR, le CII ne nécessite pas de faire de la R&D.
Le crédit impôt innovation permet de soutenir les TPE/PME (le CII leur est réservé) en finançant 30% de leurs dépenses d’innovation. Le CII est plafonné à 120 000 € de crédit d’impôt.
Précision importante, ce taux de 30% s’applique pour les travaux en innovation réalisés à partir du 1er janvier 2023. En effet, le calcul du CII a été revu par la loi de finances. Pour les travaux réalisés avant 2023, le taux applicable est de 20% et le dispositif est plafonné à 80 000 €.
* Le taux est majoré à 60% pour les DOM. En Corse, il est de 35% pour les moyennes entreprises et de 40% pour les petites entreprises.
Concrètement le CII, est-ce que c’est pour moi ?
Combien je pourrais récupérer ?
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Le crédit impôt innovation, c’est quoi ?
Dans l’ombre du crédit impôt recherche (CIR) depuis des années, il fait de plus en plus parler de lui. Qui ? Le crédit impôt innovation (CII), bien sûr ! Mais pour tous ceux dont l’acronyme CII ne veut pas dire grand chose, quelques précisions s’imposent.
Le CII est un dispositif fiscal, mis en place par l’Etat français en 2013, qui vise à soutenir l’innovation des TPE-PME (entreprises de moins de 250 salariés et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 50 millions d’euros).
Le crédit impôt innovation permet d’obtenir un remboursement de 30% de certaines dépenses liées aux travaux d’innovation. 2 questions se posent à ce stade :
1) Qu’entendons-nous par « travaux d’innovation » ?
2) Quelles sont les dépenses concernées ?
Les travaux d’innovation
Le CII concerne la conception d’un produit (ou d’un logiciel) nouveau ou d’un produit présentant des caractéristiques nouvelles par rapport à ce qu’il existe déjà sur le marché. Cela implique donc que le produit ait vocation à être mis sur le marché. Si vous développez un produit avec des caractéristiques nouvelles pour l’usage interne de votre entreprise, cela n’est pas éligible au crédit impôt innovation. Ces caractéristiques nouvelles peuvent être d’ordre technique, fonctionnel, ergonomique ou sur le plan de l’éco-conception. L’éligibilité passe donc par une analyse du marché et de la concurrence au moment de la conception du nouveau produit. Si le produit que vous développez se différencie de l’offre existante, il peut être considéré comme innovant.
Les innovations de services n’entrent pas dans le dispositif sauf si elles s’appuient sur un logiciel (plateforme, application…) ou un produit nouveau. Ex : « Blablacar » propose un service, du transport de personnes, mais cela repose sur une application.
Les phases de définition du cahier des charges, de maquettage, de conception (des POC, du produit…), de réalisation et de test des prototypes sont valorisables par le CII. Le fait que le produit ne soit pas encore sur le marché n’est donc pas un frein pour bénéficier du dispositif.Le CII peut aussi concerner des travaux d’amélioration d’une solution déjà existante, à condition que ces améliorations soient significatives. Ainsi, si vos développeurs continuent de travailler sur votre plateforme ou votre application, il y a sûrement du CII à récupérer.
Contrairement à son grand frère le CIR, pas besoin de réaliser des travaux de Recherche et Développement (R&D) pour être éligible au crédit impôt innovation. Pas besoin non plus d’avoir un ingénieur ou un docteur dans son équipe. Les profils techniques acceptés par l’administration dans le cadre du CII sont bien plus nombreux : ingénieur, docteur mais aussi développeur, designer industriel, expert UX/UI…
C’est d’ailleurs le point fort du CII. C’est un dispositif bien moins élitiste que le CIR, il concerne bien plus d’entreprises. Pourtant il y a 4 fois moins de bénéficiaires. Le CII paie là son manque de notoriété. On estime même que près de 100 000 entreprises éligibles au crédit impôt innovation passent à côté. Un vrai manque à gagner comme le montre l’étude de l’INSEE sur le CII publiée en novembre 2019. L’institut a comparé 2 groupes de PME présentant des caractéristiques similaires. Le 1er groupe est composé de PME qui bénéficient du CII et le 2e groupe est composé de PME qui n’en profitent pas. Que retenir de cette étude ? D’abord que les PME bénéficiaires du CII récupèrent en moyenne 23 000 euros par an avec ce dispositif. Enfin les entreprises bénéficiaires ont connu une meilleure croissance de leur CA, de leurs effectifs et ont mis sur le marché davantage de nouveaux produits. Pas mal non ?
Source INSEE
Les dépenses concernées
Pour faire simple, le crédit impôt innovation permet de récupérer 30% sur 4 postes principaux de dépenses pour les travaux réalisés depuis le 1er janvier 2023 (pour les travaux antérieurs un taux de 20% s’applique).
Les salaires du personnel en charge des travaux d’innovation :
C’est en général le poste qui concentre la plus grande partie du crédit d’impôt.
Avant de calculer ce que cela représente en CII, veillez à bien prendre en compte l’année de réalisation des travaux. Car à partir du 1er janvier 2023, la méthode de calcul a changé. Le taux du CII est passé de 20 à 30%. En contrepartie les frais de fonctionnement, qui regroupaient les frais annexes liés aux travaux d’innovation comme l’achat de matières premières ne sont plus comptabilisés. Ces frais de fonctionnement étaient fixés à un montant forfaitaire représentant 43% des dépenses de personnel.
Si vous souhaitez déclarer du CII sur vos activités de 2020, 2021 et 2022 (car on peut revenir jusqu’à 3 ans en arrière), il vous faudra appliquer « l’ancienne méthode de calcul ».
Si en revanche, vous souhaitez évaluer vos enjeux pour les travaux à partir de 2023, il vous faudra adopter la « nouvelle méthode de calcul ».
L’ancienne méthode de calcul (avant 2023):
Il faut prendre le salaire brut avec en plus les charges patronales éligibles (ce qui revient à ajouter environ 40% du salaire brut) et les frais de fonctionnement (fixés à 43% des dépenses de personnel éligibles). Le montant est ensuite pris au prorata du temps passé sur les travaux d’innovation.
Ainsi pour un salarié rémunéré 40 k€ brut annuel, qui passe 80% de son temps à développer un produit innovant, l’entreprise va récupérer en CII :
40 x 1,4 x 1,43 x 0,8 x 20% = 13 K€ de CII
La nouvelle méthode de calcul (à partir de 2023) :
Il faut prendre le salaire brut avec en plus les charges patronales éligibles (environ 40% du salaire brut) et appliquer un prorata du temps passé en innovation.
Ainsi pour un salarié rémunéré 40 k€ brut annuel, qui passe 80% de son temps à développer un produit innovant, l’entreprise va récupérer en CII :
40 x 1,4 x 0,8 x 30% = 13,5 K€ de CII
La nouvelle méthode est donc légèrement plus avantageuse.
Les dépenses externalisées :
Il s’agit des dépenses engagées auprès de prestataires qui se voit confier tout ou une partie des travaux d’innovation. Pour pouvoir récupérer en crédit d’impôt 30% du montant des factures à compter de 2023 de votre prestataire (ou 20% sur les factures antérieurs à 2023), celui-ci doit détenir un agrément CII. C’est un document administratif qui atteste sa compétence à réaliser des travaux d’innovation pour autrui. Si votre prestataire n’a pas encore d’agrément, il peut en faire la demande.
Si vous faites appel à un prestataire public, il n’y a pas besoin d’agrément.
Les frais de propriété industrielle :
Si votre produit ou logiciel innovant fait l’objet d’un brevet ou d’un certificat d’obtention végétale (COV), alors vous pouvez récupérer du CII sur les frais de dépôt, de maintenance et de défense. Vous pouvez également obtenir du crédit d’impôt sur les dépenses relatives à la protection des dessins et modèles.
Les dotations aux amortissements :
vous récupérez 30% des dotations aux amortissements concernant le matériel affecté aux travaux d’innovation (20% sur les dotations antérieures à 2023). Ces dotations sont à prendre au prorata du taux d’utilisation du matériel pour ces travaux.
La démarche
Le crédit impôt innovation est à déclarer dans les 3,5 mois qui suivent la clôture de l’exercice comptable. À noter que les entreprises clôturant au 31/12 ont un délai supplémentaire d’un mois puisqu’elles ont jusqu’au 15 mai pour déposer leur déclaration de CII.
Attention la déclaration porte sur les activités de la dernière année civile écoulée. Ainsi une entreprise clôturant au 30 juin 2022 a jusqu’au 15 octobre pour déclarer son CII 2021. Pour son CII 2022, elle devra attendre 2023.
Maintenant que vous connaissez votre période de déclaration, passons à la démarche. Il y a 4 étapes à respecter :
1 – Sélectionnez des projets éligibles au CII
C’est le premier réflexe à adopter. Vous devez vous assurer que votre projet vise bien la conception, le prototypage ou l’amélioration d’un produit nouveau ou présentant des caractéristiques nouvelles.
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2 – Calculez votre montant de CII et rédigez votre dossier financier
Pour chaque projet, vous récupérez 30% des dépenses éligibles réalisées à partir de 2023 (dépenses de personnel, sous-traitance, frais de propriété industrielle, dotations aux amortissements…). Le taux est de 20% pour les dépenses effectuées avant 2023.
Le dossier financier justifie les dépenses intégrées dans le calcul. Il est à transmettre sur demande de l’administration.
3 – Remplissez et transmettez le Cerfa à votre comptable
Le Cerfa est LE formulaire administratif à envoyer pour faire votre déclaration. Il reprend les étapes importantes du calcul et le montant final de crédit d’impôt à percevoir. Il est à joindre à la liasse fiscale et au relevé de solde de l’impôt sur les sociétés (IS). Si votre solde d’IS est déjà déposé, votre comptable le modifiera et le redéposera.
4 – Rédigez votre dossier technique
Le dossier technique justifie l’éligibilité de vos activités au CII. Il décrit notamment vos travaux, l’état de la concurrence au démarrage de ces travaux, les profils du personnel mobilisé sur cette activité. Ce dossier est à présenter uniquement sur demande de l’administration. Toutefois, nous recommandons de le rédiger au moment de votre déclaration. Pourquoi ? Car en cas de contrôle, c’est une des premières pièces demandées par l’administration et elle peut vous être réclamée dans les 3 ans suivant votre déclaration. Vous avez alors 1 mois pour fournir le dossier à l’administration. Je vous laisse imaginer le plaisir d’avoir à décrire avec précision des travaux réalisés il y a 2 ou 3 ans pour sauver votre crédit d’impôt… Ne prenez donc pas le risque d’avoir à rembourser votre CII et lancez-vous le plus tôt possible dans la rédaction du dossier technique.
À présent le CII n’a (presque) plus de secret pour vous. Et si certaines notions vous ont échappé, commencez par tester votre éligibilité au dispositif pour voir si le sujet mérite d’être creusé. 😉